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La blouse blanche d"™Anne-Laure

Anne-Laure, 27 ans, exerce comme kinésithérapeute depuis un an. Après avoir travaillé dans un centre de rééducation elle s"™est établie à son compte. Les situations ne sont plus les mêmes : de l"™univers clos du handicap lourd, elle est passée au monde libéral des douleurs ordinaires. Comparaisons.

La kinésithérapie qui, par définition, veut dire "mouvement et soin", est un travail d"™équipe qui regroupe généralement médecin, ergothérapeute, infirmier et psychologue. Elle permet de lutter contre les incapacités, le déficit et le handicap. Le déficit, c"™est la douleur. L"™incapacité est tout ce que tu ne peux pas faire, quant au handicap, il varie en fonction de la personne. Cette spécialité s"™adresse à tous les publics : nourrisson atteint de bronchiolite, sportif blessé, personne âgée et toute autre souffrant d"™une lésion articulaire ou musculaire. Le kinésithérapeute s"™efforce de soigner le mieux possible ce qui peut l"™être, et quand ce n"™est plus possible, l"™ergothérapeute prend le relais en complément de la kinésithérapie.

D"™après Anne-Laure, c"™est plus valorisant de travailler en centre de rééducation qu"™en libéral, un patient paraplégique demandant plus d"™investissement et d"™engagement qu"™une entorse de la cheville. En centre, il y a des cas plus lourds ; en libéral, les pathologies sont globalement moins graves : « Dans le centre où j"™ai travaillé à Bordeaux, il y avait des accidentés, des cas difficiles. Depuis que je suis en libéral, j"™ai moins de cas difficiles. Ce n"™est pas le même monde. Ce ne sont pas les mêmes objectifs. Il y a moins d"™enjeux par rapport au centre, où il y a quand même des personnes qui sont perdues socialement. Qui ont perdu leur emploi parce qu"™elles ne peuvent plus exercer à cause de leur handicap. »

La confiance qu"™Anne-Laure réussit à instaurer avec ses patients est due principalement au rapport verbal qu"™elle met en place avec eux. Savoir parler, rassurer, faire preuve de persuasion pour convaincre que tout est encore possible sont les axes principaux de ce lent travail : « Quand on dit : "En avoir plein le dos", c"™est une expression qui se vérifie à cent pour cent. C"™est à prendre en compte parce qu"™on ne peut pas se permettre de traiter qu"™un dos, un genou ou un coude. Il y a une personne derrière. On traite dans sa globalité autant que possible. C"™est ça qui est important. » Quand le courage vient à manquer, Anne-Laure n"™hésite pas à faire référence à des personnes célèbres qui vivent avec leur handicap. L"™objectif est que la personne ne souffre plus physiquement et psychologiquement.

Sur le plan relationnel, Anne-Laure essaie de s"™impliquer le moins possible. À deux ou trois reprises, elle s"™est retrouvée confrontée à des situations ambiguës, où les patients éprouvaient des sentiments qui allaient au-delà de l"™attachement. Dans ces cas-là , elle reste professionnelle en expliquant qu"™elle fera le maximum, mais qu"™elle n"™ira pas plus loin que le domaine médical. Et, quand l"™émotion la submerge, elle s"™isole le temps que ça passe. Pour elle, il est évident qu"™il ne faut pas mêler vie professionnelle et vie affective, et faire en sorte, en tant que thérapeute, de garder la distance : « Après, c"™est sà »r, il m"™est arrivé de m"™attacher plus qu"™il n"™aurait fallu. Tu t"™attaches à une personne parce qu"™elle te ramène à des souffrances qui te sont propres. C"™est plus difficile à gérer. »

En revanche, quand il s"™agit de handicaps lourds, les prises en charge courant sur plusieurs mois, une relation s"™instaure. Les séances de kinésithérapie durent généralement une heure. À certains moments, lors des massages qui sont plus doux que les exercices, le patient a le temps de parler, de se confier. Anne-Laure se contente de leur prêter une oreille, sans pour autant se permettre d"™intervenir, ni même donner des conseils sauf d"™un point de vue thérapeutique : « Je sais que ma méthode, pendant longtemps, a été le geste symbolique d"™enfiler ma blouse blanche. Je l"™enfile, je suis kiné. Le soir, quand je l"™enlève, je ne pense plus au boulot. C"™est fini, je reviens à ma vie à moi. Je fais la coupure. Pour moi, c"™était facile de faire comme ça. »

Cependant, la distance de rigueur n"™est pas toujours absolument respectée, et malgré ses réticences, des liens se sont créés avec certains : aujourd"™hui, elle a encore deux ou trois numéros d"™anciens patients qu"™elle appelle de temps en temps pour avoir des nouvelles...

Propos recueillis par Salima Tallas en mars 2005 ; rédaction : Salima Tallas ; rewriting : Patricia Rouillard.


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