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Entretien avec l’association Art-Temps Réel.

Art-Temps Réel est une structure qui travaille autour de multiples projets de musique expérimentale avec des personnes handicapées moteur cérébrales ou mentales.
Pas de but thérapeutique affiché : il s’agit ici de concevoir de réels projets de création artistique. L’important surtout est de travailler avec ces personnes dans le respect de leur dimension humaine et de leur intégralité.
Lionel Kasparian, fondateur d’Art-Temps Réel et Samuel Lartisien sont venus nous parler de leurs activités.

HandiMarseille : Qu’est-ce-que Art-Temps Réel ?

Lionel Kasparian : C’est une structure qui s’est créée en 2003 et qui a eu pour vocation première de permettre des interventions d’artistes — des compositeurs essentiellement à l’époque — dans des structures d’accueil pour personnes handicapées. L’objet initial était donc de tisser des liens et une réflexion concrète, c’est-à-dire qui s’ancre dans une pratique, entre des personnes en situation de handicap, qui ont une activité musicale dans leurs lieux de vie et des compositeurs professionnels.

H : Mais de quel type de handicap parle-t-on ?

L.K : De tout type de handicap. Historiquement nous avons commencé avec des personnes handicapées mentales, dans des foyers de vie, avec une mobilité physique correcte. Dans un second temps, avec des personnes en situation de handicap moteur cérébral, dans le cadre des IME, (instituts médico-éducatifs). Des enfants ou des adolescents, qui, à l’inverse du public cité en premier, sont en toute possession de leur capacité mentale et intellectuelle mais ont une mobilité très réduite voire inexistante. Donc c’est un peu les deux opposés en terme de gestes.
C’est donc avec ces publics qu’on a commencé à réfléchir, à poser des questions : quels types de gestes ? Pour quels types de son ? Quels sont les outils technologiques que l’on peut mettre en œuvre pour fabriquer de nouveaux instruments à destination de ces personnes-là ? Des instruments qui existent dans les nouvelles lutheries d’aujourd’hui, utilisés dans le champ de la création contemporaine « normale ». Ceux que l’on peut proposer dans des foyers parce qu’il s’avère qu’ils aient des accès gestuels assez développés qui permettent à des personnes dites handicapées de les utiliser. Donc c’est vraiment réfléchir à ces va-et-vient possibles sur les nouveaux univers instrumentaux liés aux pratiques contemporaines. Tisser les liens entre le milieu fermé d’un foyer et le milieu ouvert de la création. Faire sortir des jeunes du foyer pour les mettre dans des situations de concert tout ça par le biais de l’instrument.

H : D’où est venue cette idée ?

L.K : À l’origine d’Art-Temps Réel, il y a aussi un artiste qui travaille avec nous qui s’appelle Denis Cabacho. Il a démarré un premier atelier musique dans un foyer à Berre l’Étang. Un jour, j’ai demandé à Denis de pouvoir essayer d’intégrer mon projet de programme informatique qui consistait en un méta-instrument autour d’une batterie acoustique. Cette batterie était pleinement jouable mais dotée de capteurs qui permettent d’ouvrir le son sur des choses plus abstraites, via des gestes beaucoup plus simples, sans forcément passer par des baguettes. Le but était donc de tester ce système avec des jeunes, d’avoir de nouvelles idées par rapport aux propositions qu’ils pouvaient faire. De le confronter aussi directement à des personnes en situation de handicap pour voir un peu ce qui pouvait naître de cette rencontre.
Suite à cette expérience, le foyer a décidé d’intégrer mon travail en tant que tel à l’atelier qui existait déjà, d’augmenter cet atelier-là avec une partie instrumentale classique et une partie lutherie électronique.

H : C’était en quelle année ?

L.K : On a donc monté Art-Temps Réel en 2003 pour institutionnaliser cette nouvelle fusion entre ces deux ateliers.

H : Votre activité s’inscrit-elle dans une démarche de thérapie ?

L.K : Pas du tout. C’est une démarche artistique de création. La partie thérapie elle existe de fait car ce travail-là est toujours encadré par des équipes éducatives, des psychologues ou des musico-thérapeutes. Notre point de vue est celui du projet de création en fait, l’idée de développer un langage, un univers et de mener à terme un projet qui a une forme définie et qui concerne le champ de la création artistique.

H : Y a-t-il beaucoup de demande de la part des centres concernant les ateliers ?

Samuel Lartisien : Quand une structure s’intéresse au projet, elle trouve ça très intéressant. Ce qui va faire que le projet va se faire ou pas c’est la partie financière. Donc on a du mal à trouver des structures. Nous démarchons, aucune structure vient vers nous.

H : Avez-vous donné des concerts ?

L.K : C’est l’idée d’un duo de batterie, soumise au foyer de Berre, qui a été le premier projet finalisé donnant lieu au développement de ce travail-là à plus grande échelle. C’était un instrument assez représentatif de toute l’historique du projet, dans lequel je pouvais m’intégrer directement par ma pratique personnelle. Cet instrument était donc l’axe central du premier projet avec l’idée d’un développement informatique : la batterie était équipée de capteurs qui permettaient de brasser toute la palette sonore, du très faible au très fort, avec toute une palette de force de gestes, du très faible au très fort mais de façon croisée. C’est-à-dire qu’il était possible de faire un minimum de gestes sur la batterie, comme gratter la peau, souffler dessus ou chanter dans la caisse claire et d’avoir un son monstrueux. À l’inverse, de jouer piano avec des baguettes ou forte avec des baguettes. L’idée c’était d’avoir un instrument qui avait tout ce potentiel-là.
Ce projet a donc fini sous forme de duo, sous proposition du directeur du foyer. Il trouvait l’idée intéressante qu’autour d’un instrument qui est commun à un ensemble de gens, il puisse y avoir un duo qui se dégage avec un artiste professionnel de cet instrument-là et un jeune du foyer qui avait un gros potentiel sur cet instrument, de fortes compétences, une sensibilité artistique très développée et quelque chose à dire sur un instrument dans le cadre d’un concert mais qui n’est pas reconnu en tant que professionnel.
Donc ça a commencé à la manière des duos de batterie qui se faisaient dans les années 50 aux États-Unis : vous avez une seule batterie, une grosse caisse au milieu, un fût d’un côté et de l’autre, une pédale d’un côté et de l’autre sur la même grosse caisse. On prend une caisse claire chacun, un charleston chacun, on met des cymbales pour les deux et en fait on se retrouve à jouer sur la même batterie à la manière d’un duel. Aux États-Unis ils faisaient des duels de batterie entre deux pointures, ils faisaient des solos pendant des heures. Donc on s’est installé dans ce rapport de duo-duel, à 1,50 m face à face, la batterie complète équipée de capteurs. Les deux personnes ont accès au système informatique de la même manière, de façon autonome, ils peuvent en jouer ou pas.
Ce duo a été fait avec une personne trisomique qui s’appelle Jean-Michel. Il a une sensibilité particulière. Il ne parle pas mais s’exprime beaucoup avec la voix : il peut crier, chanter... il est très visuel justement.
L’idée était de confronter deux approches sur l’instrument ; mon approche est très professionnelle, avec un minimum de gestes, maximum d’efficacité, l’objectif c’est la vitesse, l’économie d’énergies, etc. Lui, c’est plutôt l’inverse : maximum de gestes, minimum d’économie, ça va très vite, très fort. C’est un espèce d’électron libre, qui peut d’un coup se lever et jouer sur les cymbales, il s’approprie l’espace.
C’est un garçon qui est très timide mais il a vraiment un projet artistique qui est le sien. C’est quelqu’un qui a conscience d’un temps de concert, de ce qu’est une représentation publique.

H : Où est-ce que cela se déroulait ?

L.K : Les répétitions se faisaient tout d’abord dans le foyer puis on nous a prêté un studio d’enregistrement. On a en fait décidé de sortir ce projet-là du foyer pour en faire un véritable projet artistique. Jean-Michel n’est plus résident du foyer maintenant.

H : Une improvisation ça se répète ?

L.K : C’est un projet qui est semi improvisé, c’est-à-dire sont définis un instrumentarium,la batterie ; une durée de concert, vingt minutes à peu près ; on se donne des points de rendez-vous, une manière de commencer et de finir et enfin on se donne des codes visuels, pour savoir qui est fatigué, qui en a marre, qui a un problème...

H : Et la personne intègre facilement ces codes ?

L.K : En fait la personne ne les intègre pas, lorsqu’elle a un problème elle m’en fait part avec ses codes à elle. Moi je dois intégrer ses codes. De la même manière, quand moi j’ai un problème, au bout de dix fois, si je refais la même tête elle le comprend aussi. Il y a un travail qui dure une année, voire plus même. Jean-Michel je le connais depuis longtemps, ce sont des projets sur du long terme, on répète toutes les semaines et toute l’année.

H : Où a eu lieu le premier concert ?

L.K : À Marseille, au parvis des arts.

H : Comment le public a perçu le concert ? C’est peut être déroutant ?

L.K : Pour un public habitué au handicap, les parents, les éducateurs, par exemple, c’est déroutant parce que c’est perçu comme plutôt violent.
Déjà c’est un duo de batterie, un instrument fort et plutôt nerveux. Le duo est plutôt nerveux aussi. Après dès qu’on s’éloigne du schéma standard, c’est un duo qui a plutôt très très bien marché. C’est-à-dire pour un public des scènes expérimentales, c’était un duo. La question du handicap ne se posait pas. On était interrogé sur le résultat du projet. Et dans le milieu du handicap, c’est très bien passé aussi car pour eux c’était un vrai projet artistique, qui intégrait complètement la personne dans sa dimension humaine et dans son intégralité. Il ne s’agissait pas de faire jouer Jean-Michel « à la mode de » ou de lui faire faire de la batterie comme on fait dans un conservatoire.

H : Au point de vue personnel, qu’est ce que cela vous a apporté ? Étiez-vous vous-même déjà sensibilisé sur la question de handicap avant de travailler sur ce projet ?

L.K : Pas du tout, moi j’ai débarqué là comme dans la jungle ! Ce sont des rencontres : dans un foyer, on a affaire à des personnes qui sont porteuses d’un univers très particulier parce qu’elles sont nées comme ça. En plus de cela, elles vivent dans un univers particulier, un foyer c’est une planète à part. Elles ont donc un rapport à l’expression qui est fonction de ce qu’elles sont au départ et de l’environnement dans lequel elles vivent. Donc c’est exponentiel. Quand ces personnes ont compris qu’elles pouvaient s’exprimer sur un projet artistique, que l’éducateur est là mais qu’il va rester assis et nous laisser faire, là elles vont commencer à s’exprimer et c’est rock’n’roll. Donc c’est vachement intéressant car on a accès à de nouveaux gestes. Elles ont un autre rapport à l’instrument, à la parole parce qu’elles s’expriment comme elles peuvent et un autre rapport au temps car leur vie est limitée et cadrée dans des structures mais en même temps, leur temps à elles est tout autre. Du coup, quand elles ont accès à un espace ouvert, elles prennent leur place : si la personne était très lente par exemple, là elle sera vraiment très lente car elle a le temps. Donc on a accès à des gestes instrumentaux et à des durées musicales qui sont hallucinantes, quasiment irreproductibles sauf dans le cas de génies.
Jean-Michel a une approche musicale très gestuelle et scénographique : pour lui, jouer d’un instrument et faire un concert, c’est pas juste le sonore, il prend tout l’espace scénographique. Donc pendant des mois, j’ai été ridicule face à lui dans mon rapport instrumentiste. Je me faisais bouffer complètement. Il a donc fallu que je réutilise des codes de Jean-Michel afin d’exister pour à un moment donné pouvoir lui dire « non mais là , c’est moi qui vais passer devant, c’est toi qui va jouer piano »... Du coup, tous ces gestes-là, je les ai intégré dans mon propre travail d’instrumentiste improvisateur. J’ai pris conscience que quand je dois faire un geste technique, je le fais et quand il y en a moins besoin, je reprends de ce duo-là, de cette énergie et de cette inspiration.

H : Est-ce que vous continuez à travailler avec Jean-Michel ? Une fois le projet terminé, cela se passe comment ?

L.K : C’est la problématique de ce milieu-là : on est réellement dépendant des foyers, des éducateurs, des structures.

H : Est-ce que vous avez été amené à concevoir ou modifier des instruments de musique par rapport au travail que vous faites ?

L.K : Tout à fait, c’est le travail de Sam.

S.L : J’ai d’abord préféré utiliser des instruments qui existaient pour les détourner mais sans faire de modification. Ensuite il y a la partie création instrumentale qui est la lutherie électronique. Pour celui qui a une mobilité très réduite, qui ne peut bouger que la tête par exemple, on ne trouvera pas un instrument pour jouer. Comment va-t-il accéder au sonore avec ce geste-là, un mouvement de tête qu’il peut faire et qu’il maîtrise très bien ? Il faut donc créer un instrument. Ainsi la partie lutherie électronique c’est tout simplement une série de capteurs, qui peuvent être de toute sorte, capteur de pression sur lequel on va appuyer, capteur d’inclinaison que l’on va pouvoir bouger ou capteur de proximité.

L.K : En gros, on rencontre une personne et on se dit qu’est-ce qu’elle peut faire ? Quelles sont ses possibilités physiques ? Ensuite, il faut chercher les moyens techniques qui permettent de faire en sorte que, le peu de gestes qu’elle peut faire, puisse avoir un sens musical. Qu’elle puisse d’abord déclencher du son et puis que le dispositif soit suffisamment fin pour qu’elle puisse avoir un geste musical, avec des nuances, de la finesse, de la variété, des timbres différents, etc. Ça c’est vraiment de la création. Donc pour quelqu’un qui ne peut bouger que la tête, il faut trouver quelque chose qui permet de mesurer l’inclinaison de la tête par rapport à un point zéro. Pour ça donc, on utilise des capteurs qui vont permettre selon les mouvements de tête de jouer un son de manière différente.
Si vous voulez, tout cela c’est un panel : le travail avec la personne, la fabrication d’un instrument et la finalité artistique c’est la même chose. C’est le rapport à l’humain qui détermine la création à l’instrument et une fois qu’on a une personne, un instrument, le projet est déjà à moitié construit. Notre objectif c’est de trouver un terrain de jeu commun avec des personnes, qu’elles soient handicapées ou pas.

S.L : L’intitulé de l’association, Art-Temps Réel, englobe tout ça : composition en temps réel et art acousmatique. Ce n’est pas très précis mais dans tous nos projets, on se retrouve là-dedans.

H : Qu’est ce que l’art acousmatique ?

L.K : L’art acousmatique c’est l’art des sons fixés. Une œuvre acousmatique est une œuvre fixée, enregistrée sur un support. Elle est composée à partir de toute source sonore possible, qu’elle soit acoustique, électronique, électro-acoustique, concrète, de la vie de tous les jours... Ces enregistrements sont faits au choix du compositeur et ces sons-là sont composés d’une manière musicale au sens le plus large possible. C’est donc fixé sur support comme un film. Il n’y a pas de composition en direct, c’est d’ailleurs pour cela que l’on parle de cinéma pour l’oreille. Elle est, dans 99 % des cas, donnée à entendre sur un orchestre de haut-parleurs. L’idée étant de pouvoir faire passer un film, que vous verriez à la maison sur votre télévision, sur un écran cinéma où les profondeurs et l’espace seraient démultipliées. Et bien là c’est pareil : on passe de l’œuvre composée dans un studio d’enregistrement par un compositeur, avec deux haut-parleurs, à un orchestre de 50, 80 ou 100 haut-parleurs où tous les plans sonores et tous les détails vont être grossis. Donc pendant un concert, il y a un CD, c’est le support et puis ensuite il y a un musicien qui joue, qui actionne les bons haut-parleurs au bon moment et au bon endroit.

S.L : Pour avoir une idée de l’installation lors d’un concert, au centre de la salle il y a une table de mixage où jouera le musicien. Il mettra donc le CD et actionnera les haut-parleurs. Le public est installé autour de la table et tout autour du public il y a les haut-parleurs. Le musicien sera donc interprète ici. C’est donc une des choses que l’on fait à Art-Temps Réel : on navigue donc de la composition en temps réel à l’interprétation. On va être également musicien improvisateur.

H : Des personnes handicapées sont-elles également inclues dans ce travail ?

S.L : Oui, une personne handicapée peut se retrouver partout là-dedans. On vient de faire un double CD de compositions acoumastiques faites à partir des ateliers de musique avec les personnes en situation de handicap. On passe donc de la musique improvisée à l’art acousmatique. Ce projet-là comporte non seulement de la musique, il y a également des photos, des textes écrits par les personnes en situation de handicap. Il sera présenté à la rentrée en septembre.

L.K : L’idée d’art acousmatique et musique en temps réel, c’est aussi qu’il y a des personnes qui ne peuvent pas faire de concert. Parce que l’idée d’un moment et d’une durée de concert leur échappe complètement. Donc avec certains, on travaille avec l’art acousmatique, qui nous permet d’avoir tout le temps qu’on veut. D’être dans des studios, d’enregistrer des choses entières et pleines quelque soit la durée. Ensuite on peut retravailler à partir des enregistrements : on fait des compositions qui ont des formes présentables dans le monde dans lequel on vit. Une pièce de musique, ça a un format, une durée, donc on retravaille les choses avec eux, on travaille sur support c’est plus souple. Il y a une jeune fille qui par exemple a un univers très éthéré : je l’enregistre chuchoter, elle est dans le pianissimo. Donc quand on construit un univers sonore autour de quelque chose de vocal qu’elle fait, on va donc rester dans l’éthéré. Au final, cela fait une pièce de musique qui la représente pleinement. On a un peu la quintessence de sa nature.

S.L : L’une des raisons pour lesquelles j’aime travailler avec des personnes handicapées, c’est qu’il y a beaucoup moins de freins et de barrières quand on fait des propositions. Quand on propose nos musiques étranges, celles que l’on va entendre qu’à 3 h du matin sur France Culture, et bien normalement, ça passe pas. C’est tellement méconnu que c’est difficile. Mais par contre quand on arrive dans un foyer, qu’on met en place un morceau de batterie, un clavier, un micro, des capteurs et qu’on commence à jouer, là il n’y a aucune question, aucune barrière, hop on est parti ! Quand on leur fait écouter un CD, par exemple des portes qui grincent, et bien ils sont tout de suite dedans, à la première seconde.

L.K : D’une part ils n’ont pas de modèle culturel familial qui vient se greffer, d’autre part il y a un handicap qui fait qu’ils sont dans leur univers. Ils vont te prendre par exemple une chanson de variété, ils vont la chanter, ils vont la tordre, te mettre les trucs à l’envers, ils ralentissent, ils la chantent comme ils veulent, ils font ce qu’ils veulent dessus... rien que ça c’est un univers ! Ils cherchent pas à se caler et à être au plus prêt de l’original.

H : Quels sont vos projets ?

L.K : Un nouveau projet qu’on n’a jamais fait : on est en train de développer des projets avec des personnes déficientes visuelles. Cela fait trois ans qu’on travaille sur le cinéma pour l’oreille, les concerts se passent dans la pénombre, il n’y a rien à voir. Un jour on s’est dit finalement, il y a des gens qui sont nés sans y voir et il doit forcément se passer quelque chose entre une musique qui dérange les voyants parce qu’on n’a plus de repères visuels. En même temps, il y a des aveugles qui sont nés ainsi et on s’est dit d’un coup ce sont des musiques faites pour eux. Essayer de voir du coup s’il n’y a pas un nouveau regard sur la musique acousmatique par le fait que ces personnes soient aveugles et qui peuvent s’approprier ça. Est-ce qu’il n’y a pas un moment dans la vie où la notion de handicap n’est plus un handicap mais basculerait vers un avantage ? Il y a des seuils où à un moment donné une personne handicapée peut s’engouffrer parce qu’elle est porteuse d’un nouveau geste qui n’est pas formatée et qui peut se développer dans un environnement musical super ouvert.

_Propos recueillis par Karine Miceli et Emmanuel Ducassou
Les photographies nous ont été aimablement fournies par l’association.

Voir en ligne : Art-Temps Réel


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